L’histoire des deux jeunes princes prétendument assassinés à la Tour de Londres est l’une des légendes les plus emblématiques de Grande-Bretagne. Bien qu’elle soit largement acceptée, les preuves directes font toujours défaut. Il semble aujourd’hui que les choses auraient pu être très différentes.
Après la mort du roi Édouard IV en 1483, son fils, Édouard V, alors âgé de douze ans, devait succéder au trône. Compte tenu de son jeune âge, son oncle Richard, duc de Gloucester, est désigné comme protecteur du jeune roi. Il fait placer le jeune garçon avec son frère Richard dans la Tour de Londres, soi-disant pour leur protection.
Il n’est donc pas impossible que la protection des deux garçons n’ait pas été la véritable raison de leur internement. D’autant plus que peu de temps après, Richard déclara que le mariage de leur père était invalide et donc illégitime, et que les princes eux-mêmes perdaient logiquement leur droit au trône. Il s’est ensuite proclamé roi le 26 juin 1483 sous le nom de Richard III.
Il semble donc très logique que Richard se débarrasse des deux princes qui pourraient plus tard prétendre au trône. Cependant, son mobile est vraiment la seule « preuve » du meurtre. Il est également vrai que la dernière fois que les deux princes ont été vus dans la Tour, c’était pendant l’été 1483, mais c’est tout. Malgré cela, la théorie du meurtre est prise au pied de la lettre par les historiens réputés. Le fait que l’histoire ait été développée par William Shakespeare dans l’une de ses pièces les plus célèbres y a sans doute contribué.
L’histoire britannique est pleine de légendes. L’une d’entre elles veut que les restes de Richard III aient fini par se retrouver dans une rivière. Cette légende était considérée comme un fait historique. Cependant, grâce à une initiative de l’historienne et écrivaine Philippa Langley intitulée « Looking for Richard », il a été possible non seulement de prouver que Richard III n’avait pas fini dans la rivière, mais aussi de retrouver ses restes, qui ont pu être réinhumés dans la cathédrale de Leicester.
L’étape suivante consistait logiquement à rechercher le sort des deux neveux de Richard. En collaboration avec des dizaines, ou plutôt des centaines, d’historiens, de linguistes et d’autres experts, ils ont suivi les méthodes utilisées par la police pour rechercher des personnes disparues. Des documents contemporains provenant de toute l’Europe ont été examinés.
Et c’est en dehors de la Grande-Bretagne, plus précisément en Hollande, qu’ont été découverts des indices suggérant que les princes n’ont pas été assassinés dans la Tour en 1483, mais qu’ils ont été séparés et transportés en différents endroits. Selon des documents, au moins l’un d’entre eux était encore en vie en 1495. Il est également apparu que la théorie du meurtre a été lancée par le rival de Richard pour le trône d’Angleterre, Henry Tudor, et ce, par coïncidence, avant la bataille de Bosworth au cours de laquelle les deux devaient s’affronter. La théorie selon laquelle il serait responsable de leur disparition prend soudain tout son sens.
Tout prend donc une nouvelle dimension et il semble que la théorie séculaire de l’assassinat des princes sur ordre de Richard III ne soit pas valable. Il y a cependant des raisons de penser que Richard III était le meurtrier. Les recherches se poursuivent, bien entendu, dans le but ultime de connaître le destin complet des deux princes et, idéalement, de trouver leur dernière demeure.